A l’heure de la crise du capitalisme, de l’augmentation considérable du chômage,
de la destruction massive des services publics, des remises croissantes de la République une, indivisible, laïque, démocratique et sociale, le Président de la République a lancé un leurre pour
amuser la galerie : faut-il interdire la burqa dans la rue ?
C’est évidemment la question essentielle qui étreint d’angoisse les dizaines de
millions de citoyennes et de citoyens de ce pays. Les chiens de garde du système, complices conscients ou idiots utiles du sarkozysme en crise, se sont jetés sur l’os ainsi tendu. Nous ne les
confondons pas, bien évidement, avec d’authentiques libres penseurs et laïques qui s’interrogent sur des vraies questions.
La Libre Pensée ne leur plait pas, et c’est tant
mieux
La Fédération nationale de la Libre Pensée a pris une position unanime lors de
son congrès national de Peisey-Nancroix. Nos détracteurs perpétuels ont vu dans cette unanimité, non la force des arguments, mais l’argument de la force. Chacun voyant midi à sa porte, ils nous
ont appliqué leurs conceptions des choses : un vote unanime ne peut être que manipulation et pression organisées.
Mais hélas, trois fois hélas pour nos sycophantes professionnels, cette position
unanime des délégués de notre congrès a rencontré une très large approbation positive dans notre association. Bien entendu, quelques échos ici ou là, sur des sites internet qui ne
représentent qu’eux-mêmes et encore !, ont été, en vain, montés en épingle pour faire « genre ». Mais la réalité est là : les libres penseurs, dans leur très
grande majorité, ont approuvé la position du congrès national. Mais, comme on ne parle jamais que des trains qui arrivent en retard et jamais de l’immense majorité de ceux qui arrivent à l’heure,
les fêlés de la toile ont fait de la mousse informatique.
La position de la Libre Pensée
Nous sommes contre le port du la burqa, du niqab , de la soutane, de la
cornette, du schtreimel et autres grigris totémiques et religieux. Nous considérons que toute marque d’appartenance religieuse est une abdication de la liberté de pensée. C’est clair, simple et
net. Mais comme nos délateurs ont un rouleau de la Thora ou un crucifix dans l’oreille, ils n’entendent pas.
La Libre Pensée a défini sa position à partir de principes fondamentaux : il
n’appartient pas à l’État de dire comment les gens doivent s’habiller dans la rue. Les citoyens peuvent et doivent avoir un point de vue philosophique sur la métaphysique et ses représentations,
l’Etat doit se l’interdire. C’est l’application de la laïcité dans la sphère publique et non dans la sphère privée. La République ne peut se faire l’arbitre des élégances religieuses, sinon elle
devient liberticide. Ce sont toujours les régimes totalitaires qui imposent des tenues vestimentaires ou en interdisent d’autres.
Sacrée minijupe !
La comparaison faite par la Libre Pensée entre la minijupe, les cheveux longs et la burqa a mis les aboyeurs de service dans une rage folle. Là aussi,
nous avons analysé les choses à partir de principes fondamentaux. Pour nous, les cheveux longs, la minijupe à une époque ont été des marques de libération. La burqa et le voile nous semblent à
l’opposé de cette libération nécessaire et revendiquée.
Pour avoir porté les cheveux très longs pendant fort longtemps, j’ai encore dans
les oreilles la résonance des quolibets des « beaufs ». Que n’ai-je entendu… Force est de constater que les cheveux longs se font rares, mais les « beaufs »
sont toujours aussi nombreux. Contrairement au fameux adage « trop d’impôt tue l’impôt », malheureusement « trop de connards n’ont jamais tué la connerie
humaine ». Le débat sur la burqa en est une des plus belles illustrations.
Nous considérons que la minijupe a été, un moment, l’affirmation d’une libération
de la femme. Mais c’est notre point de vue. En démocratie, nous devons admettre que d’autres puissent avoir un point de vue opposé et pouvoir l’exprimer. Sinon, cela veut dire que nous érigeons
notre position comme une vérité officielle. Anathème à ceux qui ne sont pas du même avis que nous ? C’est cela le progrès, la liberté, l’émancipation et l’égalité en
droits ?
Torquemada de banlieue, Vychinski d’opérette
Pour nos adeptes de leur pensée unique, la Libre Pensée est forcément coupable
parce qu’elle ne partage pas leur point de vue liberticide : il faut interdire la burqa dans la rue. La Libre Pensée pourra ainsi dire ce qu’elle veut, développer tous les arguments
possibles, la cause est entendue : elle est coupable.
Pas plus que l’on ne fait boire un âne qui n’a pas soif, nous ne convaincrons
pas ceux qui ont érigé le précepte avant la preuve. Leur démarche est celle de l’Inquisition de
Torquemada. Ce qu’ils souhaitent, c’est que la Libre Pensée soit déclarée relaps et brulée sur le bûcher. Leur méthode est celle des procès staliniens de 1937 où le procureur Vychinski
déclarait : « Donnez-moi une phrase de quelqu’un, je me charge de le faire pendre ».
Dans le procès intenté à la Fédération nationale de la Libre Pensée, on est en
plein dans le délit de blasphème. Notre droit à la libre expression est cloué au pilori par les censeurs, parce que nous sommes des « mal-pensants ». On nous dénie la
possibilité d’avoir une pensée libre. On veut dicter notre conduite, et comme nous refusons, nous sommes insultés et condamnés par avance, parce que nous ne partageons pas le point de vue
« officiel ».
Nos nouveaux abonnés à la boite aux lettres de la Kommandantur ont, en fait, une
démarche totalement religieuse. Ils sont totalement imprégnés de posséder la Vérité, avec un grand V. Ce qui leur donne le droit de pratiquer le « compelle intrare »
(forcez-les à entrer) de saint-Augustin, qui a été la marque de toutes les croisades, des conversions forcées et des buchers dressés.
Mais face à cela, les libres penseurs se sont toujours dressés contre la barbarie
ecclésiastique, ils continueront à le faire contre la réaction médiatico-informatique.
Il fallait bien que ces choses soient dites un jour.
Christian Eyschen